« Chez la reine » d'Alexandre Mc Cabe

Publié le 23 Mai 2014

« Chez la reine » d'Alexandre Mc Cabe

Le Québec : un pays, des livres, toujours plus de livres ! Les dernières recrues se retrouvent toutes ici.

**************************************************************************************************************

Avec ce billet, je vous offre un « 3-pour-1 » ! Effectivement, je crois que ce livre ne peut être perçu de la même manière par :

 

1 - Les Québécois.

 

2 - Le reste du monde.

 

3 - Les gens comme moi qui viennent d'ailleurs, mais vivent au Québec depuis plus de dix ans et ne sont donc plus vraiment des touristes, mais ne seront jamais des « pure laine ». Par contre, nous avons une position d'observation privilégiée. Nous sommes dedans, mais en gardant un statut d'intrus. Drôle de position qu'il faut savoir manier, mais qui permet une lucidité certaine.

 

Débutons donc avec les numéros 1 : les Québécois.

 

Pour eux, je crois que ce livre a plusieurs fonctions. Celle d'éveiller une douce nostalgie, car ils ont connu ce que décrit l'auteur. Celle aussi de « laisser des traces » car leur histoire des dernières décennies est ici immortalisée. Celle enfin de conserver et de renouveler l'espoir de voir naître un jour leur pays, celui qu'ils souhaitent, celui dont ils rêvent.

 

 

Pour les numéros 2, soit le reste du monde et donc vous, chers amis français qui passez par ici, ce livre sera peut-être un peu abscons. Il y a effectivement ici des « références » qui risquent de ne pas évoquer grand chose pour vous et des phrases en joual dont le sens vous échappera en grande partie. Vous savez, comme les fois où vous venez nous rendre visite ou lorsque vous entendez Fred Pellerin chez Ruquier et que vous dites « j'ai rien compris ».

 

Par exemple, lors de mes premières années ici, quand on me parlait d'Harmonium (évoqué dans « Chez la reine »)... je répondais : c'est quoi ça ? Maintenant, je sais non seulement que c'est un groupe qui fut très populaire, mais je sais également ce qu'il représentait pour le mouvement souverainiste et le frisson qu'il cause parmi mes « nouveaux » compatriotes lorsqu'il est évoqué. Ce frisson-là, je ne le ressentirai jamais moi-même sur ma propre colonne vertébrale, mais il est si fort sur celles de mes voisins que je peux désormais le percevoir.

 

 

Bref, le livre d'Alexandre Mc Cabe peut, pour vous amis français, servir de prélude à une rencontre plus approfondie avec le Québec, mais je préfère vous mettre en garde tout de suite, ce n'est pas LE Québec que vous connaissez et qui vous fait rêver, celui des grands espaces, des forêts flamboyantes et du sirop d'érable. Non, c'est l'Québec d'la jasette dan chaise berçante à brunante su l'gale'rie. Envoye don une O'Keefe ! (désolée les « pure laine », y a sans doute mieux à faire, mais ça donne une bonne idée je crois.)

 

Puis, il y a les « numéros 3 », comme moi, qui lisent ce livre et qui restent un peu sur leur faim. Parce qu'il sont un peu comme les numéros 1 et qu'eux aussi depuis tout ce temps se sont pris à rêver de ce « plus beau pays du monde ». Mais... on reste sur notre faim parce que quand Alexandre Mc Cabe termine son livre par ces deux mots «Tout commence » on a juste envie de lui dire et de dire à tout ce peuple que l'on comprend désormais et que l'on aime : Oui, mais QUAND ?!?!?! Parce qu'on a beau être dans les tribunes et hurler à plein poumons pour l'encourager ce peuple en qui on croit et dont on connait le potentiel, mais on trouve que ce serait peut-être bien de commencer à compter des points. Parce que sinon, peu à peu l'enthousiasme retombe, la morosité des estrades se répercute sur le terrain et vice-versa. Et on quitte le terrain la tête basse en ne sachant même pas s'il y aura une prochaine fois.

Et pourquoi ? Par ce qu'on n'a pas pris de risques.

Résultat : Le rêve s'etompe.

 

 

C'est pas facile de faire un pays, ça demande de tout laisser tomber pour s'y consacrer. Peut-être même sa job, peut-être même son confort et son BBQ. Êtes-vous prêts ? Je ne sais pas, chacun d'entre vous y répondra pour lui-même.

 

Alexandre Mc Cabe, pour sa part, semble prêt pour écrire, puis pour s'occuper de ses enfants et leur transmettre l'histoire de leur pays qu'il a lui-même reçu en legs... mais peut-être pas pour :

 

  écrire la suite de l'histoire de son pays.

 

Il faut pourtant commencer quelque part. Il faut joindre les actes aux paroles, un à la fois.

 

On commence quand ?

« Chez la reine » d'Alexandre Mc Cabe